REGARD SUR LE FONCTIONNEMENT DES INSTITUTIONS EUROPEENNES
ECHANGES AVRIL 2019 - EURODEPUTES - PARLEMENT EUROPEEN
THEME DE LA GOUVERNANCE ET DU FONCTIONNEMENT DES INSTITUTIONS
Ont été interviewés une douzaine de députés de sensibilités et de nationalités différentes, (cette fois Jean-Marie CAVADA, Maria ARENA, Jose BOVE, Rachida DATI, Claude ROLIN, Younous OMARJEE, mArc TARABELLA, Virginie ROZIERE, nombreux regrets pour indisponibilités)
qui ont accepté de partager sur leurs retours d’expériences après un ou plusieurs mandats. Les restitutions font apparaître de nombreux points communs sur la façon d’appréhender la dimension européenne porteuse de sens avec un écart souvent établi avec les intérêts purement nationaux.
Interviewer François CHARLES – commentaires en italique
Questions de fond :
Faut-il revoir les traités considérant notamment que les votes des politiques intérieures sont en décalage avec les sujets communs ?
Quid du trilogue entre le Parlement, la Commission et le Conseil ?
L’UE doit-elle être pilotée, mais non forcément gérée, comme une entreprise avec des objectifs réalistes, réalisables et un observatoire des performances ?
Quid du droit d’initiative réclamé par le Parlement ?
Pourquoi pas un Buy European Act ?
Le Conseil suffit-il ou faut-il un sénat des régions ?
Comment accroitre le budget ?
Que penser de la division européenne sur le Brexit et des questions d’origine ?
Faut-il capitaliser sur l’acquis ou réviser la politique générale ?
Que penser d’une prise de décision à la majorité qualifié étendue ?
Faut-il revoir les domaines d’exclusivité et de partage ?
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Les institutions ont été pensées dans la deuxième moitié du 20° siècle pour le 20° siècle avec des objectifs de paix, de libre circulation, d’apprentissage à travailler ensemble, à négocier, à se mettre autour d’une table pour discuter en cas de désaccord. Ceci doit être capitalisé mais Il convient de travailler désormais pour le 21° siècle avec désormais une organisation politique pour re-donner une identité de grande puissance à l’Europe face aux Etats Unis, à la Chine, l’Inde et le Brésil. Il en est de même pour l’économie où le traité TSCG doit être revu après la sortie de crise.
Il peut-être intéressant de revoir les traités pour les moderniser face aux enjeux présents et futurs, en réformant notamment le principe des votes à l’unanimité, notamment sur la fiscalité.Toute réforme doit de toute façon aboutir à des textes simples et il convient aussi de considérer qu’il n’est pas nécessaire d’en refaire une synthèse car, de façon constitutionnelle, leur assemblage constitue un traité de facto. (La fiscalité devrait être normalisée pour les entreprise mais sans doute avec une marge de fluctuation pour la TVA, qui permet notamment aux pays de réguler leurs recettes afin d’atteindre leurs objectifs dont ceux du cadre européen). Il apparait aussi qu’il conviendrait déjà de mieux exploiter et mettre en fonctionnement pleinement ceux existants ainsi que les outils mis à disposition, notamment pour adapter la politique de la BCE voire pour certains instituer un parlement de la zone euro sous mandat BCE. (Sur ce point, on peut penser qu’il n’est pas forcément utile de créer une nouvelle structure à cause de la monnaie, même si une grande différence réside dans le fait que les pays qui sont rentrés dans l‘euro ne peuvent plus dévaluer et sont obligés de respecter certaines règles dont déficit public inférieur à 3%, dette publique inférieure à 60% du PIB, en échange d’une grande force et stabilité de la monnaie). Le référendum est un outil à la fois très démocratique et très dangereux à user avec modération et expertise.
Le Parlement a évolué d’une instance d’avis à un pouvoir de co-décision mais pas sur tout car les pères fondateurs ne l’ont pas voulu (Ce qui est peut-être désormais utile de revoir ?). Il s’inscrit de plus en plus comme un acteur institutionnel à part entière. Son pouvoir est en augmentation mais est perfectible. La mise en œuvre des commission spéciales est bonne comme par exemple sur diesel gate et les pesticides mais il reste à avancer sur le droit d’initiative de mettre à l’agenda certains sujets, que l’on retrouve pourtant dans chaque pays et qui est essentiel, et les domaines régaliens et réservés. Pour certains c’est la seule faille mais beaucoup voient le pouvoir extraordinaire et disproportionné du Conseil qui peut refuser la discussion ne pas négocier avec les institutions parfois avec une caducité en cas d’absence de discussion pendant 5 ans. Un pilotage démocratique fin doit être maintenu avec une co-décision au parlement dans tous les domaines partagés mais également exclusifs (union douanière, règles de concurrence, politique monétaire des Etats de la zone euro, politique commerciale commune et certaines parties pèche et budget) même si non voulu au départ par les pères fondateurs, afin de pouvoir créer des acteurs capables de se mesurer au plan mondial tout en maintenant des objectifs d’ouverture commerciale dans une vraie politique industrielle et dans une vision prospective afin notamment de soutenir une production.
Le budget et les ressources propres doivent être augmentées et notamment par la taxe sur les transactions financières sans peur de détourner les investissements. Pour certains, il s’agit d’un vrai faux budget et vrai faux parlement ! La majorité s’accorde à dire que les ressources propres doivent évoluer pour faire réellement apparaitre l’Intérêt général européen au-delà de chaque politique nationale. Le Parlement doit avoir un avis plus que consultatif pour ne dire que oui ou non et se prononcer sur la répartition sauf à entretenir l’incohérence entre effets d’annonce et la capacité de financement en fait prises sur d’autres domaines, comme au niveau national. La différence, de 1 à 20, doit être réduite avec les Etats-Unis, incluant certes la défense mais comme avec la Chine et les autres grands blocs fédéraux. Le constat général est que les Etats à travers le Conseil semblent demander d’un côté sans donner le pouvoir de l’autre
La jurisprudence post traité de Lisbonne est permanente. Les députés européens sont à mis à l’épreuve des pouvoirs qui leur sont nouvellement conférés et qu’ils doivent exercer avec courage face au Conseil et la Commission. La mise en place des trilogues, procédure hors traité, entre le Parlement, la Commission et le Conseil est une grande évolution, donne un pouvoir renforcé aux députés et a fait évoluer la relation entre institutions et notamment entre commission et Parlement sur la validation des grands paquets. Pour autant le parlement doit pouvoir arrêter le trilogue pour parvenir à une négociation solide dès qu’il se sent influencé par le Conseil.
Pour certains les trilogues posent un problème en terme de démocratie sur la façon dont ils fonctionnement et dont les accords sont entérinés. Pour d’autres, le secret reste la garantie pour pouvoir avancer. La CJUE a occupé en partie l’absence de traité constitutionnel (et qui instruit et décide d’ailleurs en secret, cf conférence Dijon).
Pour certains, Il ne semble pas exister de véritable espace public européen car les questions européennes sont analysées de façon nationale avec des votes d’opposition (on a pu le voir notamment pour le Brexit, voire pour le référendum ou le vote européen en France ou l’élection de députés français opposés au système) qui ne semble pas être capable d’apprécier la dimension européenne et qui n’y est pas associée (mais toutefois prévu) et qui n’est plus qu’une chambre d’enregistrement des décisions prises par les Institutions. Les députés sont également assez cloisonnés entre nations ou groupes de nations (les listes transnationales seront peut-être la solution). Aligner les élections européennes et nationales, au moins lors du renouvellement du Parlement européen, permettraient sans doute d’éviter les incompréhensions vécues dans les pays ayant porté une opposition aux institutions ou à la politique générale en sein des institutions.
Certains sont d’accord avec la mise en place d’une seconde chambre, des nations ou des régions, un bi-caméralisme démocratique, toujours pertinent dans l’histoire des démocraties et que l’on retrouve dans 24 pays, avec une également une codécision. Le Conseil, que la Commission considère être le Sénat, n’est pas élu. D’autres misent plutôt sur le renforcement des pouvoir du Parlement européen en matière d’initiative et contrôle. (On peut penser que les premiers veulent plutôt trouver des alliés face au Conseil et la Commission avec la reconnaissance des études plus poussées réalisées avec pourquoi pas une intégration du Comité des régions qui ne serait plus uniquement consultatif alors que les seconds ne veulent pas le risque de contre-pouvoir et d’ailleurs le sénat français, qui défend pourtant le bicaméralisme, préfère ne pas s’y prononcer).
Certains pensent que les acquis doivent être capitalisés et non remis en question notamment par les nouveaux entrants et notamment sur les principes de solidarité, la préservation des normes européennes, la préservation des choix internes, des échanges internationaux, des conditions de consommation et de production dans une optique environnementale. Certains verraient bien une nouvelle répartition des sujets à partager mais sans affaiblir le projet européen et sans revenir à la situation d’avant. D’autres réclament une analyse nécessaire de la crise du Brexit pour une certaine prise de conscience et possible remise en question.
Les procès faits à la Commission doivent être fait au Conseil européen qui fait les orientations. La commission n’est pas un gouvernement et fait un travail de « boite noire » peu visible en amont sauf pour les acteurs sur le terrain en testant ses idées par les processus de consultations nationaux organisés par les Etats qui vont ensuite peser sur ce que peut proposer la commission. Certains estiment donc que le conseil a donc un coup d’avance à chaque fois car la vérification au niveau du Parlement ne se fait pas (peut-être faudrait-il que les Parlementaires consultent aussi largement. On peut par contre noter une certaine de la Commission qui se méfie toutefois de l’origine des demandes sur certains dossiers).
Un effort est à faire sur les accords commerciaux où la commission, qui semble rester sur le dogme du libre échange, avance sans consultation et avec compétence exclusive entre le mandat de négo et la conclusion de l’accord (notamment relevé sur l’accord avec le Japon, marche forcée) avec des propositions qui arrivent déjà par un compromis avec le Conseil et Il n’est pas bon que les Parlement nationaux soient contournés mais avec l’accord des chefs d’Etat. (on peut se souvenir du manque de réponse du DG concurrence à la question posée au Conseil d’Etat sur le fait de savoir qui de l’UE ou des Etats-Unis, avait demandé la tenue de négociations pour un traité commercial). Il n’y a pas de compétence législative en matière de politique internationale et le conseil européen assez absent de la vie au Parlement européen.
FC